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Palabras de Coline
24 août 2007

NouVellEs 24 août

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Déjà deux mois ! Que du bonheur quand on ne voit pas passer le temps… en profiter, prendre le temps, prendre du bon temps !

L’hiver tire à sa fin mais il fait encore froid et quelques centimètres de neige nous surprennent encore certains matins. Le peuple se réveille et la terre s’active, la sève fait ses premiers pas timide et incertaine.

C’est la saison des semis sous abris et je vais essayer de faire mon petit jardin dans les quelques mètres carrés qui entourent cette charmante maisonnette… la terre est bien noire, très argileuse et gorgée d’eau : cette zone est un ancien « pantano », zone humide, moitié marécageuse… la quinoa et le thym n’aimeront peut être pas mais la rhubarbe sourit déjà !

Le travail est très diversifié et pas toujours facile mais chaque jour plus intéressant.

Je participe à « l’équipe technique » du projet de Label « Valle Araucania » : ce projet est né au début de l’année à l’initiative d’une institution « mesa publica privada » (qui se rapproche un peu de nos communautés de commune)… une bonne idée dont les agriculteurs viennent juste de prendre connaissance, et notre tache est de les impliquer dans le processus avec une méthodologie participative (construction de protocole et cahier des charges selon leurs valeurs et leur identité). Ils sont très réservés et surpris qu’on leur donne la parole et cet espace de décision… assez fictif selon mon point de vue : leur volonté est d’améliorer la qualité de production voire de produire en agriculture biologique et selon les coutumes mapuches.

Bonne idée s’exclament  maires et divers présidents, seulement il n’existe actuellement pas de techniciens en agriculture bio (techniciens spécialistes en Round Up et semences certifiées), pas de formation agricole spécifique, et les lois d’orientation vont plutôt dans le sens inverse avec la prochaine autorisation des OGM, l’interdiction implicite des TRAFKINTU (échange traditionnel de semences au printemps) via les accords de l’OMC signés et ratifiés par le Chili… qui par ailleurs fait parti des pays considérés comme développé qui continuent à s’opposer à la ratification de l’Accord 169 de l’OIT, reconnaissant les peuples indigènes et leurs droits en temps que peuples originaires colonisés…

Un sac de nœud politique, où les lobby ne sont pas en marge… et pendant ce temps le développement durable est servi comme partout à toutes les sauces !!

Je travaille également avec deux groupes de paysans sur le thème du « turismo rural ». Plus à l’Est, près de la côte, plusieurs familles de la communauté de Las Quinientas (voir photos !) se sont regroupées pour faire de l’accueil… oui de l’accueil et non du tourisme, « ce tourisme qui nous demande de tout modifier dans nos maisons, nous sommes paysans, c’est notre identité, notre vie, pourquoi changer ce que l’on aime ? »

paysage_de_las_Quinientas

Un groupe bien motivé, qui doute, qui s’organise, téméraire ou méfiant… mon rôle est de renforcer les échanges entre les familles, de mener des discussions sur comment accueillir, l’importance de l’hygiène, la simplicité de l’échange, sur l’utilisation des produits locaux et la valorisation de l’agriculture de la communauté (troc et échanges de services).

C’est un lieu vraiment magnifique, avec des gens convaincus, riche de leur identité, fiers d’être « del campo », et qui ont le cœur dans la main ! Un vrai plaisir…

Une organisation de Villarrica (Kom Kelluhayim), de plus de 200 familles, s’intéresse au même sujet… et là c’est une autre paire de manches ! Organisation fondée il y a 25 ans par l’Université Catholique, dans une dynamique d’assistantialisme, et participation par intérêt souvent matériel. Pas tout à fait indépendante, la Corporation Kom Kelluhayim (« Nous nous aidons tous ») regroupe une multitude de projets, de la conservation de la Gallina Mapuche (poule Mapuche) à la CUMA locale ( mise en commun de matériel agricole), en passant par le centre informatique communautaire. Une organisation qui regroupe des familles de onze communautés, avec de nombreux conflits internes, éthiques, financiers, politiques…

Le projet de tourisme rural s’est d’abord orienté vers le montage d’un projet avec recherche de financements et offre d’amélioration infrastructurelle des familles intéressées… la même dynamique du « cadeau-intérêt ». En discutant avec les dirigeants, nous nous sommes peu à peu mis d’accord sur une autre stratégie : Réfléchir d’abord à ce qu’est le tourisme, les impacts positifs ou négatifs que cette activité peut engendrer, la perception des habitants des communautés, leur considération par rapport à leur identité, à leur organisation sociale, et à l’évolution de leur milieu, leurs préoccupations, leurs rêves. C’est un premier pas primordial :  si une famille commence à accueillir, elle implique toute la communauté dans cette activité (ouverture), et il semble important de réfléchir aux changements sociaux, économiques (modifications des revenus) et culturels (folklorisation de la culture) qu’elle peut engendrer, pour pouvoir les accompagner, les limiter ou les favoriser.

Suite à ce travail, l’idée serait de former un petit groupe de cinq familles déjà prêtes à accueillir et de constituer un autre groupe de réflexion et d’observation éthique… si ça fonctionne, ces familles pourront par la suite parrainer chacune une autre famille pour grossir le groupe et répondre aux nécessités d’adaptation, aux préoccupations, aux interrogations.

Un grand défi, un beau projet où j’essaye de n’être qu’une partie du mode d’emploi et non une pièce du moteur…

Et puis il y a aussi le cours de gastronomie… 30 personnes de toute la région, un mélange culturel fabuleux, de la cordillère à la côte Pacifique…Mapuche Peuenche (du pignon de l’Araucaria, cordillère), Mapuche Williches(de la plaine) , Lafkenches (de la côte), chiliennes et chiliens, et une française qui écarquille les yeux, les oreilles attentives à toutes ces histoires de peuples et de cuisine !

Tiens en parlant de cuisine… me voilà maintenant spécialiste des escargots !!! Il y a un mois, l’association Fundar qui organisait un séminaire sur l’élevage des escargots pour l’exportation m’a demandé si je pouvais cuisiner quelques escargots… car les français mangent des escargots n’est-ce pas ? J’ai répondu pourquoi pas, comme une expérience dont je n’avais aucune expérience sinon la seule dégustation des cagouilles cuisiner de rares fois à la maison. Et me voilà employée comme chef de cuisine des escargots pour le séminaire avec 8 kg de cagouilles dans les bras ! Je n’en menais pas large mais je ne pouvais que faire bonne figure…

Epilogue : Escargots au beurre de coriandre et persil, version Bourguignonne, Brochettes d’escargots à la farine de blé grillée (produit local), Cagouilles à la sauce tomate, Consommé d’escargot au Merken (piment fumé) et pignon d’araucaria… Malgré les crampes d’estomac pour cause de cuisinière bien stressée, c’était super bon, et les gens très contents !!!

En parlant de spécialiste, des paysans du Nord du Chili,  région du désert d’Atacama, m’invite en septembre à visiter leur projet : utiliser des grottes d’anciennes mines pour cultiver des champignons… et comme ça existe pour le Roquefort en France, me revoilà convoquée comme spécialiste !! Mais là, j’ai dit non : c’est incroyable toute la crédibilité qu’est donné aux étrangers européens ou américains !!! Du coup ils m’invitent quand même pour que je puisse faciliter les contacts avec la France en vue d’organiser un voyage pour ces paysans, et visiter les grottes de Roquefort (objectif : contrôle de l’humidité, obscurité, champignons parasites…) (Si vous connaissez des expériences qui puissent les intéressés, merci pour les contacts merci pour eux)

Le « reste du temps », je vais chez la José et la Valentina para tomar Once (4h chilien qui remplace le dîner), je discute avec mon voisin de porte japonais Yosuke, je me marre avec les copaings, je cuisine, je « camine » ou chemine, et je me suis mise au tissage… égyptien ! (Voir photos) Un métier à tisser mobile où la tisserande s’accroche à un arbre… une communication entre la plante et l’artiste qui se dévoile par les dessins qui naissent de ces belles paroles…

Grandes besos de la Coline

La pleine lune sur le lac de Villarrica...

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Commentaires
B
salut Coline,<br /> <br /> je n'ai pas eu le temps de tout lire mais ton travail est excellent. Ce que tu dis au sujet des américains et des français ( cette sorte de confiance absolue) est à la fois bien et préoccupante ( vous n'avez pas encore de Chinois?)<br /> <br /> Je sais que tu n'as pas le temps mais je vais essayer de retrouver le site d'une vidéo de l'anthropologue Maurice Godelier ( 3 cours d'introduction à l'anthropo )<br /> <br /> grosses bises et bon courage<br /> <br /> ODem<br /> <br /> P.S : comment faisons nous pour valoriser ton travail au Maroc en ton absence? ton ouvrage est apprécié tant dans la forme que dans le fond. Les personnes qui le prennent dans les mains sont comme attirés, respectueux.
J
Bonjour Coline,<br /> vraiment intéressant les projets menés au Chili. Au vu de tes explications les échanges et les liens créés et la dynamique dans laquelle ils s'inscrivent peuvent aboutir réellement à une organisation et un développement local autres que, comme tu le dis, ce que l'on veut mettre aujourd'hui derrière ces termes développement, local, durable... et qui parfois ont des impacts finaux plus négatifs que positifs!!<br /> Au plaisir de continuer à lire de tes nouvelles, très bonne continuation!!<br /> Bises, Julien.
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